Aux Origines du Ragnarök



Aux origines, il y avait un trou...

Le monde émergea d'un gouffre béant, le Ginnungagap, par la volonté, dit-on, du grand-père d'Odin.
Celui-ci multiplia alors les créations et commença à former ce petit lopin de terre qui accueillerait plus tard son célèbre descendant, fruit d'une géante et d'un dieu.
Le fils n'appréciant guère les géants ainsi apparus et qui peuplaient une terre qu'il convoitait, il décida à son tour de prendre le contrôle de la création du monde avec ses frères.

Il terrassa Ymir, le géant du givre, et de son corps naquit notre monde tel que nous le connaissons. On en arrive, comme toujours avec ce mythes, à la partie peu ragoûtante de la modélisation des choses : les nains purent éclore des vers rongeant la dépouille d'Ymir.

Quatre d'entre eux se virent confier la tâche de soutenir le firmament, lui-même forgé du crâne du géant trépassé. De ses cils fut également construit un rempart autour de Midgard afin de contrer une éventuelle réplique des géants soucieux de venger leur géniteur – on n'est jamais trop prudent, surtout avec des créatures balaises de plusieurs mètres de haut !
Bref, recyclage complet du gros géant glacé dont chaque partie et particule servirent à donner naissance à un être, un objet, une terre. Le soleil et la lune furent harnachés à des chars avec, à leurs trousses, les loups Skoll (Répulsion) et Hati (Haine), les poursuivant sans cesse.

Le monde de Midgard fut alors créé, abritant le royaume des hommes. Et comme on ne mélange pas les torchons et les serviettes, son opposé apparut : Asgard, où les dieux se regroupaient pour fomenter leurs petits desseins de conquête.
Neuf mondes au total composaient cet ensemble, dans lesquels chacun des peuples était pris d'une irrésistible envie d'aller taper sur son voisin, annonçant déjà le Ragnarök, fin tragique de l'univers ainsi instauré. Par ailleurs, Odin sentant le coup venir, un pont fut érigé pour séparer ces royaumes belliqueux d'Asgard, sous la forme d'un arc-en-ciel appelé Bifröst et scrupuleusement gardé par Heimdall.
Ce dernier fut également envoyé sur terre pour créer les diversités humaines, ou plutôt les classes sociales qui devaient différencier les êtres. De ses joyeuses galipettes dans diverses demeures naquirent les esclaves, les hommes dits libres et enfin les nobliaux.

Bifröst

Le pont Bifröst séparant les deux mondes

Ginnungagap

Le gouffre Ginnungagap d'où le monde émergea



Un peuple de joyeux lurons (et ce n'est pas peu dire !)

Le monde nordique était donc composé de clans rivalisant sans cesse. Les géants d'un côté, les humains en Midgard.
Les dieux étaient séparés en deux fratries : les Ases vivant en Asgard aux côtés d'Odin, puis les Vanes ayant pour représentants Njördr, Freyja et Freyrn oeuvrant à des activités plus saines telles la fécondité et l'agriculture.
Ils remettaient souvent leurs destins entre les mains des Volvas, voyantes aux obscures prédictions, mais prises très au sérieux et respectées. D'innombrables créatures occupaient les domaines souterrains, aquatiques ou se promenaient dans les cieux.

Les trolls, bien souvent serviteurs des géants, se terraient dans le Jotunheim. Les serpents, dont l'origine mythologique reste ténébreuse puisqu'ils ne peuplaient pas les terres nordiques, s'auréolaient d'une symbolique maléfique et malsaine, associée à la mort.
En revanche, le dragon était, quant à lui, orné d'une aura bien plus forte, inspirant effroi et puissance, à tel point que son effigie était accrochée aux proues des vaisseaux. Le drakkar fendait ainsi les eaux et se dessinait dans la brume, gueule béante, affamé, telle une mise en garde aux flottes ennemies approchant.

Véritables artisans des reliques mystiques, les nains fabriquaient souvent des armes fabuleuses pour les dieux. Ainsi, Odin chérissait sa lance Gungnir et Thor se vit offrir Mjöllnir (le Concasseur) forgé par les nains Brokk et Eitria à la demande de Loki.
Il ne pouvait le brandir sans mettre au préalable les gants de fer Jarngreip, tant sa puissance était dévastatrice. Si Thor était le plus admiré des dieux, de par sa force et sa puissance faisant tomber en pâmoison les demoiselles au premier rang, Odin, lui, était le plus vénéré car le plus craint.

Le chiffre neuf était sordidement associé à ce personnage puisqu'une des cérémonies conduites dans son temple consistait à sacrifier neuf âmes, humaines et non humaines, pendant neuf jours, et ce renouvelable tous les neuf ans. On retrouve la trace d'une sorte de rituel analogue aujourd'hui, organisé suivant un nombre d'années précis et se terminant toujours par un pugilat et le sacrifice du moins fort.
On appelle ça le sport, il paraît. Ces cérémonies étaient par ailleurs essentielles à une bonne hygiène de vie. Chez les Vikings, les banquets et les sacrifices étaient indissociables ; une bonne pinte (à Uppsala en Suède ou à Lejre au Danemark) entre deux petits sacrifices, pour célébrer n'importe quelle occasion, était monnaie courante.
Seul le chiffre attribué au nombre de personnes conviées à faire partie du banquet divin avait une fonction bien précise et ne souffrait d'aucun hasard.

MjöllnirMjöllnir

Le célèbre marteau de Thor : Mjöllnir

Odin

Odin sur son trône, entouré de ses deux loups et de ses deux corbeaux et tenant à la main sa lance, Gungnir


Une fin des plus joyeuse !

On saute enfin la partie la plus intéressante, celle où tout le monde se bat et où le joli dessein des dieux devient du pugilat primaire et frénétique.
Ce qui particularise la mythologie nordique est la perpétuelle annonce de la fin du monde dès ses prémices ; divinités et hommes savent qu'ils sont sur terre pour combattre et se préparer à une fin inéluctable, quels que soient leur chemin, leur origine ou leur milieu.
Le monde doit être détruit, même Odin ne peut intervenir contre cet événement. Le Ragnarök se déclenche après un long hiver de plus de trois ans ; c'est Heimdall qui prévient ses petits congénères du début de la baston, en soufflant dans son cor Gjarllarhorn.

Les plaines de Vigrid sont alors le théâtre des affrontements entre Odin et ses armées face au géant Surt, émergeant des terres enflammées du Muspellheim.
Les forces d'Odin se composent des autres dieux ainsi que des âmes des guerriers qui ont succombé au combat, les Einherjars. Une bataille sanglante s'ensuit, où les pièces tombent les unes après les autres.

Peu importe qui remporte une victoire, car il est occis juste après par un autre adversaire. Fenrir, fils de Loki, sorte de gros loup enragé, a ainsi le plaisir de mettre lui-même à terre le prétentieux Odin.
Le serpent Jörmungand, terrassé par Thor, se charge tout de même du sort de son meurtrier, en lui crachant copieusement au visage du poison mortel. Thor laisse alors son terrible marteau, Mjöllnir, comme célèbre relique à ses descendants.
Heimdall et Loki ne peuvent décider qui des deux rira en premier et s'infligent réciproquement une magistrale tapette létale. Le pont Bifröst cède finalement sous les assauts des géants incendiaires.
Surt met le feu aux planches, mais surtout à Freyr ; Tyr succombe aux blessures reçues lors de son combat avec le loup à quatre yeux, Garm le gardien du Helheim.

Pour conclure ce joyeux méchoui, sous les fracas des affrontements, les étoiles tombent, le ciel s'éventre et les mers s'ouvrent pour engloutir ce qu'il reste du monde.
Les deux loups Skoll et Hati finissent par rattraper les astres qu'ils poursuivaient depuis toujours et par les dévorer, crevant ainsi définitivement la voûte céleste.
Enfin, le serpent-dragon Nidhög se fait une joie de survoler tout ce petit monde pour ramasser les cadavres, parce que... ce n'est pas propre quand ça traîne !

Quelques survivants peuvent toutefois témoigner de cette effroyable bataille : les fils d'Odin et de Thor, ainsi que deux humains, Lif, et Liftrasir, qui se sont ô combien courageusement, cachés dans l'arbre sacré Yggdrasil, dont les racines mâchouillées par Nidhög commencent à ne plus pouvoir supporter le poids.
De ce cataclysme sans précédent émerge alors un nouveau monde. Les deux humains rescapés commencent à repeupler ce nouvel âge, un goût bien amer dans la bouche et avec l'ombre des massacres passés planant toujours au-dessus de leurs têtes.

Loki et Heimdall

Loki et Heimdall se donnant la mort mutuellement

Thor

Thor terrassant Jörmungand, le Serpent du monde

Heimdall

Heimdall prévenant ses congénères à l'aide de son cor, Gjarllarhorn
(Remarquez la présence du pont Bifröst - dont Heimdall est le gardien - en arrière plan).



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